Marthe et Marie en concurrence ?
Pourquoi voyons-nous entre Marthe « l'active », et Marie « la contemplative » deux mouvements qui s'opposent ? Ne serait-ce pas deux réponses, en nous, à la venue du Christ, deux réponses qui ne s'excluent pas mais demeurent nécessaires dans notre cheminement croyant. Depuis Origène et Augustin, en passant par Teresa de Jésus, Bérulle et Maître Eckhart, les interprétations inclinent à faire concorder les réponses des deux sœurs pour présenter la demeure de Béthanie comme le premier « Château de l'âme » ! Bien sûr, Marthe risque de se perdre dans la multiplicité des tâches, mais Marie pourrait aussi s'évader dans l'illusion de l'unité possédée !
Ouvrons le texte et ses commentaires séculaires, et déchirons la surface de la lettre, pour nous enfouir tout entiers dans son message.
Pour Origène, la contemplation biblique ruisselle en paroles, en gestes et en actes.
Thérèse d'Avila nous rappelle que la position de justesse, l'humilité vraie, consiste à ne pas vouloir être Marie avant d'avoir travaillé avec Marthe.
Bérulle met en relief le nouveau sens de l'action et de la contemplation chez le disciple de Jésus, en qui paroles, œuvres et prière à son Père participaient du même mouvement.
Maître Eckhart présente une Marthe en chemin d'accomplissement, conduite par son action à la joie de la béatitude éternelle.
« Accueillez avec douceur la parole plantée en vous et capable de vous sauver la vie. Et soyez les réalisateurs de la parole, pas seulement des auditeurs qui s'abuseraient eux-mêmes » (Lettre de Jacques 1,21-22).
