Lundi 13 mars de 18h 30 à 20h ou mardi 14 mars 2023 de 15h à 16h 30
Enquête sur Jésus de Nazareth – En quête de Jésus le Christ (2)
La Traversée de la nuit avec, comme fil conducteur, l'Évangile de Luc
Les controverses au Temple
Fiche de Préparation
Plus d'une fois, Jésus a débattu de questions religieuses avec les autorités de son peuple : les évangiles synoptiques regroupent ces discussions en deux séries. La première se situe en Galilée, au commencement de l'activité publique de Jésus : débat sur l'accueil et les repas avec les pécheurs, observance du repos du Shabbat… La position de Jésus peut se résumer ainsi : la Loi est faite pour l'homme et non l'homme pour la Loi. Si l'interprétation de la Loi mène à l'exclusion, au rejet, à la mort, il vaut mieux la transgresser pour sauver la vie… Jésus se met ainsi en rupture avec l'interprétation des Pharisiens de son époque : la nouveauté de l'Evangile ne peut être contenue dans de vieilles outres ; il lui faut des outres neuves. Vision marginale, provocante, insupportable au point que ses adversaires en viennent à vouloir sa mort.
La deuxième série de discussions se situe dans la partie finale de l'Evangile, après la contestation de Jésus au Temple. Les interlocuteurs ne sont plus les Pharisiens mais les grands prêtres, les anciens et les scribes : les membres des trois classes qui constituent le Sanhédrin (tribunal religieux et civil de la Palestine au temps de Jésus), sous la présidence de grand prêtre en exercice. Les sujets débattus sont différents de ceux des controverses galiléennes.
Pour une présentation du thème, voir la vidéo :
Jésus partage un repas chez un Pharisien – Luc 14,1-14
Les événements de la proclamation messianique lors de l'entrée de Jésus à Jérusalem et la contestation menée dans le temple provoquent une réaction des responsables religieux. La première interrogation porte suer l'autorité de Jésus, sur l'origine de son autorité : « Dis-nous en vertu de quelle autorité tu fais cela ? » (Luc 20,1-8). Jésus ne répond pas directement à la question mais propose une parabole…
Parabole des vignerons meurtriers : Luc 20,9-18
01 Un de ces jours-là où Jésus, dans le Temple, enseignait le peuple et proclamait la Bonne Nouvelle, survinrent les grands prêtres et les scribes avec les anciens. 02 Ils lui demandèrent : « Dis-nous par quelle autorité tu fais cela ? Ou alors qui est celui qui t'a donné cette autorité ? » 03 Il leur répliqua : « Moi aussi, je vais vous poser une question. Dites-moi : 04 Le baptême de Jean venait-il du ciel ou des hommes ? » 05 Ils firent entre eux ce raisonnement : « Si nous disons : “Du ciel”, il va dire : “Pourquoi n'avez-vous pas cru à sa parole ?” 06 Si nous disons : “Des hommes”, le peuple tout entier va nous lapider, car il est persuadé que Jean est un prophète. » 07 Et ils répondirent qu'ils ne savaient pas d'où il venait. 08 Alors Jésus leur déclara : « Eh bien, moi non plus, je ne vous dis pas par quelle autorité je fais cela. »
09 Il se mit à dire au peuple la parabole que voici : « Un homme planta une vigne, loua celle-ci à des vignerons et partit en voyage pour un temps assez long. 10 Le moment venu, il envoya un serviteur auprès des vignerons afin que ceux-ci lui remettent ce qui lui revenait du fruit de la vigne. Mais les vignerons, après l'avoir frappé, renvoyèrent le serviteur les mains vides. 11 Le maître persista et envoya un autre serviteur ; celui-là aussi, après l'avoir frappé et humilié, ils le renvoyèrent les mains vides. 12 Le maître persista encore et il envoya un troisième serviteur ; mais après l'avoir blessé, ils le jetèrent dehors. 13 Le maître de la vigne dit alors : “Que vais-je faire ? Je vais envoyer mon fils bien-aimé : peut-être que lui, ils le respecteront !” 14 En le voyant, les vignerons se firent l'un à l'autre ce raisonnement : “Voici l'héritier. Tuons-le, pour que l'héritage soit à nous.” 15 Et, après l'avoir jeté hors de la vigne, ils le tuèrent. Que leur fera donc le maître de la vigne ? 16 Il viendra, fera périr ces vignerons et donnera la vigne à d'autres. » Les auditeurs dirent à Jésus : « Pourvu que cela n'arrive pas ! » 17 Mais lui, posant son regard sur eux, leur dit : « Que signifie donc ce qui est écrit ? La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d'angle. 18 Tout homme qui tombera sur cette pierre s'y brisera ; celui sur qui elle tombera, elle le réduira en poussière ! »
19 À cette heure-là, les scribes et les grands prêtres cherchèrent à mettre la main sur Jésus ; mais ils eurent peur du peuple. Ils avaient bien compris, en effet, qu'il avait dit cette parabole à leur intention. 20 Ils se mirent alors à le surveiller et envoyèrent des espions qui jouaient le rôle d'hommes justes pour prendre sa parole en défaut, afin de le livrer à l'autorité et au pouvoir du gouverneur.
La vigne : voir l'enracinement dans le Premier Testament en Isaïe 5,1-7
01 Je veux chanter pour mon ami le chant du bien-aimé à sa vigne. Mon ami avait une vigne sur un coteau fertile. 02 Il en retourna la terre, en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité. Au milieu, il bâtit une tour de garde et creusa aussi un pressoir. Il en attendait de beaux raisins, mais elle en donna de mauvais. 03 Et maintenant, habitants de Jérusalem, hommes de Juda, soyez donc juges entre moi et ma vigne ! 04 Pouvais-je faire pour ma vigne plus que je n'ai fait ? J'attendais de beaux raisins, pourquoi en a-t-elle donné de mauvais ? 05 Eh bien, je vais vous apprendre ce que je ferai de ma vigne : enlever sa clôture pour qu'elle soit dévorée par les animaux, ouvrir une brèche dans son mur pour qu'elle soit piétinée. 06 J'en ferai une pente désolée ; elle ne sera ni taillée ni sarclée, il y poussera des épines et des ronces ; j'interdirai aux nuages d'y faire tomber la pluie. 07 La vigne du Seigneur de l'univers, c'est la maison d'Israël. Le plant qu'il chérissait, ce sont les hommes de Juda. Il en attendait le droit, et voici le crime ; il en attendait la justice, et voici les cris.
Les perspectives d'Isaïe et celle de Jésus, semblent différer : destruction chez le premier, vigne confiée à d'autres vignerons chez le second.
Intrigue de la Parabole :
+ L'attention se porte-t-elle sur les fruits ou sur les relations entre les envoyés et les vignerons ?
+ L'envoi du fils qui se solde par le meurtre fait basculer la parabole : de l'échec d'un contrat de fermage à la captation d'un héritage.
+ « Fils bien-aimé » rappelle le titre donné à Jésus lors du Baptême et de la Transfiguration (Luc 3,22 et 9,35).
+ Violence, convoitise d'un pouvoir et d'un héritage illégitime, meurtre, refus de sépulture…
Visée de la Parabole :
20,19 « À cette heure-là, les scribes et les grands prêtres cherchèrent à mettre la main sur Jésus ; mais ils eurent peur du peuple. Ils avaient bien compris, en effet, qu'il avait dit cette parabole à leur intention ».
+ Le complot est éventé par Jésus.
20,17 « Mais lui, posant son regard sur eux, leur dit : « Que signifie donc ce qui est écrit ? La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d'angle. 18 Tout homme qui tombera sur cette pierre s'y brisera ; celui sur qui elle tombera, elle le réduira en poussière ! »
+ Bien que menaçante, la Parabole doit être replacée dans le genre littéraire biblique de l'avertissement comme appel à la conversion et situe ainsi Jésus dans la longue tradition prophétique des envoyés de Dieu rejetés par le peuple : Psaume 117,22 « La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle : 23 c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux ».
Les scribes et les veuves
Dans un long monologue (Luc 20,20-47), Jésus dénonce la fatuité des scribes, leur cupidité au détriment des veuves et l'hypocrisie de leurs longues prières :
Luc 20,21 « Les scribes l'interrogèrent en disant : « Maître, nous le savons : tu parles et tu enseignes avec droiture, tu es impartial et tu enseignes le chemin de Dieu selon la vérité. 22 Nous est-il permis, oui ou non, de payer l'impôt à César, l'empereur ? » 23 Mais Jésus, percevant leur fourberie, leur dit : 24 « Montrez-moi une pièce d'argent. De qui porte-t-elle l'effigie et l'inscription ? – De César », répondirent-ils. 25 Il leur dit : « Alors rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. » 26 Ils furent incapables de le prendre en défaut devant le peuple en le faisant parler et, tout étonnés de sa réponse, ils gardèrent le silence. 45 Comme tout le peuple l'écoutait, il dit à ses disciples : 46 « Méfiez-vous des scribes qui tiennent à se promener en vêtements d'apparat et qui aiment les salutations sur les places publiques, les sièges d'honneur dans les synagogues et les places d'honneur dans les dîners. 47 Ils dévorent les biens des veuves et, pour l'apparence, ils font de longues prières : ils seront d'autant plus sévèrement jugés. »
L'offrande de la veuve (Luc 21,1-4)
En contrepoint, surgit une veuve misérable : sans aucune affectation, elle glisse deux piécettes dans le tronc du Temple. Jésus capte le geste de la veuve et instruit ses disciples :
21,01 Levant les yeux, il vit les gens riches qui mettaient leurs offrandes dans le Trésor. 02 Il vit aussi une veuve misérable y mettre deux petites pièces de monnaie. 03 Alors il déclara : « En vérité, je vous le dis : cette pauvre veuve a mis plus que tous les autres. 04 Car tous ceux-là, pour faire leur offrande, ont pris sur leur superflu mais elle, elle a pris sur son indigence : elle a mis tout ce qu'elle avait pour vivre. »
+ Le geste de la veuve semble interprété par Jésus comme un don de toute sa vie ; il fait sa louange ! Ce geste peut être mis en consonance symbolique avec celui que Jésus va vivre en croix :
Marc 10,42 « Jésus les appela et leur dit : « Vous le savez : ceux que l'on regarde comme chefs des nations les commandent en maîtres ; les grands leur font sentir leur pouvoir. 43 Parmi vous, il ne doit pas en être ainsi. Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur. 44 Celui qui veut être parmi vous le premier sera l'esclave de tous : 45 car le Fils de l'homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude. »
Ruine du Temple et jugement de Jérusalem (Luc 21,5-36)
05 « Comme certains parlaient du Temple, des belles pierres et des ex-voto qui le décoraient, Jésus leur déclara : 06 « Ce que vous contemplez, des jours viendront où il n'en restera pas pierre sur pierre : tout sera détruit. » 07 Ils lui demandèrent : « Maître, quand cela arrivera-t-il ? Et quel sera le signe que cela est sur le point d'arriver ? » 08 Jésus répondit : « Prenez garde de ne pas vous laisser égarer, car beaucoup viendront sous mon nom, et diront : “C'est moi”, ou encore : “Le moment est tout proche.” Ne marchez pas derrière eux ! »
Le discours apocalyptique tient une même place dans les évangiles synoptiques, au sortir du conflit avec les pharisiens et sadducéens. En Luc 21, ce discours de Jésus précède les récits de la Passion à Jérusalem. Son rôle et son contenu annoncent-ils la fin du monde, la fin d'un monde ou/et le début d'une espérance que viendrait inaugurer sa Passion ? Cette destruction du Temple est-elle l'expression d'une colère apocalyptique attendue au moment du jugement dernier ? Annoncerait-elle la fin des temps et le jugement définitif du Seigneur ? Matthieu, Marc et Luc, sont très méfiants lorsqu'il s'agit de voir dans les catastrophes les signes annonciateurs de la venue du Juge eschatologique, le Fils de l'homme, et la fin du monde ou plutôt d'un monde.
Dans ce drame naît un espoir : la venue du Fils de l'homme. L'Evangile souligne l'importance du nécessaire discernement. Rien n'est évident. Ni les signes, ni la venue du Fils de l'homme. Il ne peut être désigné d'un doigt par les uns ou les autres, ni même, plus étonnant, par des signes et des prodiges dont sont avides bien des croyants en attente. Alors que reste-t-il ? La venue du juge eschatologique est associée à une mort, qui aura bientôt lieu, celle du Christ et Fils de Dieu. Le bouleversement céleste, décrit ici, annonce déjà l'avènement de la Passion.